Vingt-quatre heures après la conférence de presse retentissante de M.Carlos GHOSN, les réactions des Japonais ont été relayées par NIKKEI. Loin de faire la lumière sur le fond de l’affaire, l’opération de communication n’a fait que susciter l’incompréhension et attiser la colère des Nippons à commencer par les salariés de Nissan. Toutefois, il existe un contraste entre d’une part, les salariés du groupe automobile japonais qui craignent pour l’image de la marque et donc de l’avenir de leur emploi , et d’autre part le parquet de Tokyo qui a condamné les propos de M.GHOSN.
Un manque de sincérité de la part de l’ex-dirigeant
Les salariés de Nissan et les personnes impliquées dans cette affaire judiciaire ont unanimement reproché « le manque de sincérité » de M. GHOSN avant d’exprimer que celui-ci devrait « retourner au Japon pour faire face à la justice ». Les responsables du parquet de Tokyo, quant à eux, ont estimé qu’ils « n’avaient pas de leçons à recevoir de la part d’un fugitif ».
Un salarié d’une cinquantaine d’année employé à l’usine Nissan de Yokohama ne cache pas son incompréhension : « je respectais notre dirigeant pour avoir redressé notre entreprise en diminuant drastiquement les coûts sans faire de concession. Aujourd’hui je suis très déçu ». En effet, à la conférence de presse il a vu son ancien dirigeant « qui ne cessait de répéter en boucles des arguments pour justifier sa fuite illégale du Japon », avant de regretter qu’il « n’eût pas fait preuve de sincérité ».
Sur le fond de l’affaire, M.GHOSN a répété sa version des faits, celle d’un « complot fomenté par la direction de Nissan » lors de la conférence de presse du 8 janvier. Le salarié interrogé rétorque : « s’il prétend être innocent comme il l’affirme, pourquoi ne défend-il pas son point de vue devant la justice de notre pays au lieu prendre la fuite ? ».
S’il prétend être innocent comme il l’affirme, pourquoi ne défend-il pas son point de vue devant la justice de notre pays au lieu de prendre la fuite ?
Salarié de Nissan
Cependant les Japonais sont aussi conscients que le coup médiatique soigneusement mis en scène par M. GHOSN a été une réussite en sa faveur, au vu des unes de la presse étrangère. Ainsi, les employés de Nissan craignent que les agitations médiatiques autour de cette affaire impactent négativement les résultats et l’image de l’entreprise. De plus, ils savent que le Japon ne pourra pas faire grand-chose pour empêcher M.GHOSN de continuer à s’adresser aux médias du monde.
Le bureau de procureur réplique
Le 9 janvier au matin, le parquet de Tokyo a immédiatement réagi : « un homme qui a fui l’Etat de droit n’a pas à donner de leçon sur ce que doit être la justice » avant d’ajouter que « la conférence de presse de M. GHOSN n’est rien d’autre qu’une campagne d’attaques contre la justice japonaise, et ses propos le fruit de son imagination ». Aussi, dans un pays où la maîtrise de soi est considérée comme une forme de politesse vis-à-vis de l’auditoire, le style adopté par le fugitif passe mal. Un procureur observe : « c’est agaçant de le voir gesticuler grossièrement sans jamais donner de contre arguments concrets sur les faits pour lesquels il a été inculpé. C’est comme s’il avouait qu’il est coupable au vu des preuves réunies contre lui ».
Le parquet de Tokyo, par la voix de du procureur M. Takahiro SAITO a donné son point de vue par une phrase simple publiée en japonais et en anglais sur son site web : « (L’ex dirigeant de Nissan) a violé la loi de notre pays et s’est enfui clandestinement à l’étranger par crainte d’une punition ». C’est la deuxième fois, après la fuite de M.GHOSN , que le parquet réplique officiellement. En effet, il estime qu’il est important de donner des messages clairs afin d’éviter tout malentendu avec les pays étrangers.
NIKKEI 09/01/2020 (source 【ゴーン元会長会見に 誠意見えず 日産社員ら失望】)