L’introduction des travailleurs étrangers provoque la baisse des salaires

Mi-juin, à l’est d’Osaka. Dès le matin des ouvriers vietnamiens et indonésiens astiquent d’arrache-pied des pièces en métal. Nous sommes dans une fabrique de l’entreprise SANKYO qui emploie 110 salariés et fournit des piles à combustibles à la société KYOCERA ainsi que des pièces détachées à la firme MATSUDA. Près de 60% des effectifs sont composés de stagiaires étrangers.

« Pour pallier au manque de mains d’œuvre et baisser les charges fixes, il a fallu augmenter le nombre de travailleurs étrangers », affirme son PDG Teruo MATSUMOTO. L’emploi des Vietnamiens commence en 2000 et depuis, dans les lignes de productions ils ont remplacé progressivement les employés nationaux. Plus récemment, le recrutement a été étendu dans le reste de l’Asie où le prix de la main d’œuvre est encore meilleur marché. C’est le cas de Sigtel SUSMA stagiaire de 23 ans originaire du Nepal qui souhaite « apprendre le savoir-faire japonais et rentrer chez lui pour l’appliquer ». Pour son apprentissage, il est payé tous les mois environ 150 000 JPY (1200 EUR).

Selon le ministère du travail et de la santé, le Japon comptabilisait 1 128 000 travailleurs étrangers en 2017, ce qui représente 2% de la population active nippone. En cinq ans ces chiffres ont quasiment doublé.

Selon une étude de la banque BNP PARIS BAS sur les étrangers en fonction de leur titre de séjour, entre 2012 et 2017 le nombre de stagiaires et d’étudiants étrangers ont augmenté d’un peu moins de 300 000.  En revanche les étrangers qualifiés n’avaient augmenté que de 100 000 pendant la même période. L’analyste Ryutaro KONO affirme que « les stagiaires et les étudiants étrangers travaillent à un salaire bas en raison de la pénurie des mains d’œuvres dans les konbinis(supérette 24h/24h) et les usines. La raison pour laquelle le salaire n’augmente pas en dépit de la situation de tension sur le marché du travail où l’offre est supérieure à la demande, est que les travailleurs étrangers peu qualifiés acceptent les salaires bas ».

L’institut de recherche DAIWA souligne que le salaire mensuel moyen de quelques 49millions 260 000 travailleurs ayant un emploi permanent (équivalent du CDI en France) s’élève à 354 855 JPY (2838 EUR) alors que celui des stagiaires étrangers tourne autour de 130 000 JPY (1040 EUR). La rémunération des stagiaires est calculée en fonction du salaire minimum qui diffère selon les préfectures et selon les secteurs d’activité, le nombre d’heures supplémentaires et le prix du logement.  La banque du Japon souligne que même en calculant approximativement, le salaire horaire d’un stagiaire étranger n’est que de 800 JPY par heure  ce qui est déjà inférieur à celui d’un employé japonais à mi-temps.

Le taux de chômage du mois de mai avait été de 2.2%, du jamais vu depuis 25 ans, mais le salaire augmente très peu. Le gouvernement a publié en juin ses orientations fondamentales dites « orientations audacieuses » pour la politique économique et financière future. Parmi elles, il annonça une plus grande ouverture du pays aux travailleurs étrangers.   Selon un proche du gouvernement, il s’agit en réalité « d’une décision prise devant un manque criant de mains d’œuvres dans le secteur des services à la personne. Le gouvernement a comme objectif d’accueillir 20 000 étrangers à l’avenir ».  Les étrangers acceptant des salaires bas croîtront certainement. Il sera difficile de nier qu’ils n’exerceront pas de pression sur les prix.

(Source NIKKEI 24/07/2018 外国⼈ 賃⾦鈍化招く ⾼収⼊の⼈材は頭打ち)